Préparer sa retraite passe aussi par un test auditif
Alors que la suspension de la réforme des retraites jusqu'en 2028 offre un répit aux futurs retraités, les professionnels de santé rappellent l'importance cruciale de préparer cette transition sur le plan sanitaire. L'audition, souvent négligée, constitue pourtant un enjeu majeur pour préserver sa qualité de vie après 60 ans. Un Français sur quatre souffre d'une forme de déficience auditive, mais seule une minorité consulte.
Le gouvernement vient d'annoncer la suspension de la réforme des retraites jusqu'en janvier 2028, gelant ainsi le relèvement progressif de l'âge légal de départ. Cette décision adoptée par l'Assemblée nationale le 16 décembre dernier maintient l'âge légal à 62 ans et la durée de cotisation à 170 trimestres pour les prochaines années. Dans ce contexte, les futurs retraités disposent d'un délai précieux pour préparer au mieux cette nouvelle étape de vie. Et si la planification financière reste essentielle, la dimension sanitaire mérite une attention toute particulière, notamment concernant l'audition.
Une étude récente de l'Inserm révèle qu'un Français sur quatre présente une forme de déficience auditive, avec 4% de la population touchée par une perte invalidante. Pourtant, la prise de conscience reste tardive : la plupart des personnes attendent plusieurs années avant de consulter, selon la Fondation pour l'audition. Une réticence dommageable quand on sait que 65% des plus de 65 ans sont concernés par la presbyacousie, cette perte d'audition liée au vieillissement.
Quand la retraite rime avec isolement social
Les conséquences d'une perte auditive non traitée dépassent largement le simple inconfort. Un audioprothésiste que nous avons interrogé le confirme : "Nos fonctions d'alerte et d'analyse de notre environnement sont amoindries. On peut davantage craindre de sortir de chez soi. L'activité physique diminue donc aussi." Le retrait progressif de la vie sociale constitue l'une des premières manifestations visibles de cette dégradation. Les personnes malentendantes peinent à suivre les conversations dans les environnements bruyants, renoncent aux sorties entre amis, évitent les réunions familiales.
Cette mise à l'écart involontaire s'accompagne d'effets psychologiques préoccupants. La fatigue auditive, les maux de tête récurrents et l'irritabilité en fin de journée témoignent de l'effort constant que représente la compensation du déficit auditif. Plus grave encore, le lien entre perte auditive et déclin cognitif est aujourd'hui scientifiquement établi. Selon les chercheurs, 9% des maladies neurocognitives pourraient être évitées si les patients concernés portaient un appareil auditif.
Des tests accessibles pour un dépistage précoce
Face à ces enjeux, consulter un spécialiste dès les premiers signes devient impératif. Le site officiel pour-les-personnes-agees.gouv.fr rappelle qu'il est possible de réaliser un autotest comme premier indicateur. Des applications validées scientifiquement, recommandées par le ministère de la Santé, permettent également un repérage initial. Mais seule une consultation avec un médecin ORL ou un médecin généraliste formé permet un diagnostic précis.
L'examen audiométrique demeure la référence pour évaluer l'ampleur de la perte auditive et orienter vers la solution adaptée. Un senior de région parisienne témoigne : "J'ai attendu trop longtemps avant de consulter. Quand j'ai enfin franchi le pas, l'audioprothésiste m'a expliqué que plus on réagit tôt, plus il est facile de s'adapter." Les professionnels recommandent désormais de consulter tous les cinq ans avant 50 ans, puis tous les trois ans par la suite.
Pour les personnes souhaitant faire tester leur audition auprès d'un centre spécialisé (ici), diverses solutions existent sur le territoire, permettant un premier dépistage gratuit et une orientation personnalisée selon les besoins identifiés.
Le dispositif 100% santé facilite l'équipement
L'obstacle financier, longtemps rédhibitoire, s'est considérablement réduit depuis la mise en place du dispositif 100% santé en 2021. Les appareils auditifs de classe 1 bénéficient désormais d'un remboursement intégral par la Sécurité sociale et les mutuelles. Un progrès majeur quand on sait qu'un appareil auditif coûte en moyenne entre 950 et 2000 euros selon le niveau technologique choisi.
La base de remboursement de la Sécurité sociale s'élève à 400 euros par appareil, avec une prise en charge effective de 240 euros. Les complémentaires santé complètent ensuite ce montant, permettant d'accéder à des équipements de qualité sans reste à charge dans le cadre du 100% santé. Pour les personnes de moins de 20 ans ou celles cumulant déficience auditive et visuelle, les conditions sont encore plus favorables avec une base de remboursement portée à 1400 euros.
L'audioprothésiste joue un rôle central dans ce parcours de soins. Il réalise les réglages et l'adaptation des prothèses en fonction des besoins spécifiques de chaque patient. Un essai d'un mois, sans engagement, permet de vérifier que le modèle proposé apporte un gain satisfaisant. Le suivi périodique pendant toute la durée de vie de l'appareil fait partie des prestations incluses dans le prix.
Anticiper pour mieux vivre sa retraite
Dans le contexte actuel de vieillissement démographique, la question auditive prend une dimension de santé publique. Plus d'un quart de la population française dépassera les 65 ans d'ici 2040, et les projections annoncent près de 5 millions de personnes de plus de 85 ans en 2050. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026 en témoigne, avec 100 millions d'euros alloués aux habitats intermédiaires et le doublement des équipes spécialisées Alzheimer pour accompagner cette transition démographique.
Les dépenses de santé des seniors explosent après 70 ans, entre mutuelles coûteuses et restes à charge importants. Un senior peut aujourd'hui dépenser entre 150 et 200 euros par mois pour sa complémentaire santé. Les soins dentaires, auditifs et optiques figurent parmi les postes les plus problématiques, malgré les réformes récentes. Le renoncement aux soins progresse dans ces domaines, alors même qu'ils conditionnent largement le maintien de l'autonomie.
La période de transition avant le départ effectif en retraite représente une fenêtre d'opportunité pour effectuer ces bilans de santé essentiels. Prendre en charge sa santé auditive avant 60 ans facilite grandement l'adaptation ultérieure et préserve les capacités relationnelles indispensables à une retraite épanouie. Comme le souligne un professionnel de santé : "La perte auditive questionne l'image de soi, on réalise que l'on vieillit. Mais plus on réagit tôt, plus il est facile de s'adapter." Une démarche qui s'inscrit pleinement dans une stratégie globale de préparation à la retraite, au-delà des seuls aspects financiers.